Marie-Ghislaine et Christiane sont respectivement agricultrice à Jodoigne et Beauvechain, dans le Brabant-wallon. Leurs exploitations sont spécialisées dans l’élevage bovin laitier.

Cela fait à peu près 35 ans qu’elles sont investies au sein d’une structure agricole féminine, d’abord au sein de l’Alliance Agricole Féminine (AAF) pour Marie-Ghislaine, de l’Union Professionnelle Agricole Féminine (UPAF) pour Christiane et puis au sein de l’UAW de Jodoigne, où elles ont tissé des liens d’amitiés très forts.

Toutes deux institutrices/professeur de formation, elles ont toujours eu à cœur de transmettre, communiquer, sensibiliser les enfants aux réalités du secteur agricole. Marie-Ghislaine et Christiane sont deux agricultrices sur qui nous avons toujours pu compter, et qui apprécient partager leur expérience.

 

  • UAW : Comment êtes-vous rentrées dans la structure syndicale féminine ?

MGD : Par hasard ! Au sein de l’AAF, je participais régulièrement aux activités provinciales mais me rendre à Bruxelles me faisait peur… C’est à la fusion des deux mouvements, qu’une coordinatrice AAF est « venue me chercher pour boucher un trou » et représenter le Brabant dans la nouvelle structure.

CM : Je me suis retrouvée dans la structure dès 1980 avec Alice Grégoire qui était mon mentor.  Je m’en souviens comme si c’était hier car mon fils était petit et me demandait pourquoi les petits des dames ne pouvaient pas venir en réunion.

 

  • UAW : Comment votre implication dans le mouvement a-t-elle évolué au fil des années ? 

CM : Tout de suite, j’ai adoré pouvoir m’investir et je suis retrouvée assez rapidement dans le train en direction de la Rue Antoine Dansart à Bruxelles pour les réunions nationales. Je suis devenue secrétaire de la section de Jodoigne. Puis je suis devenue Présidente Provinciale et là, c’est la découverte des réunions nationales, des bureaux, des dossiers… Que de souvenirs…

MGD : Sans que l’on s’en rende compte, au fur et à mesure, notre implication évolue de plus en plus, au point que cela nous apporte plus que ce que l’on donne… Je dirais aussi que j’ai suivi l’évolution de l’agriculture et du mouvement lui-même, au fur et à mesure des défis à relever, du traitement des dossiers… Ma « première implication » syndicale en tant que représentante de l’UAW au sein de la Commission lait de la FWA reste un souvenir d’émancipation marquant. Pouvoir, en tant que représentante des femmes, prendre place au sein de la structure mixte a été pour moi une grande satisfaction.

 

  • UAW : Qu’est-ce que le mouvement vous a apporté dans votre vie de femme et dans votre vie d’agricultrice ?

MGD : Une vraie émancipation ! L’envie d’être autre chose que « la femme de » et pouvoir exister par moi-même, cela représente un apport considérable dans une vie… M’engager m’a aussi apporté de nombreuses connaissances, des outils qui m’ont permis de ne pas trop subir ma vie d’agricultrice et de garder la maîtrise au quotidien. Ces nouvelles connaissances m’ont aussi permis de mettre mon quotidien en perspective et de me positionner pour voir ou je voulais aller, de réfléchir autrement, plus loin… Faire partie de ce mouvement cela m’a aussi permis de développer un esprit d’ouverture grâce aux nombreuses rencontres que j’ai pu faire. L’esprit avant-gardiste du mouvement et sa volonté de soulever des sujets innovants, c’est aussi ce qui fait notre richesse !

Grâce au mouvement, je me suis révélée, pour l’UAW j’ai tout osé : jouer la comédie notamment…

CM : Des rencontres… des amitiés fortes, durables…Une grande famille… C’est bien simple, une fois que l’on ne fait plus partie des structures parce que on est pensionnée par exemple, cela crée un vide. C’est à ce moment-là que vous vous rendez compte à quel point vous avez besoin de ce soutien, de cette écoute, de ces amies.

 

  • UAW : Quels ont été les moments les plus marquants à l’AAF, l’UPAF et à l’UAW ?

CM : Le statut social !!! On ne se rend plus compte aujourd’hui quel combat cela a été… Des années, des années de réunions pour faire comprendre aux instances politiques qu’il était nécessaire de rendre une visibilité et un honneur à toute une tranche de population : les épouses d’agriculteurs qui travaillaient, qui s’investissaient dans les fermes, qui transformaient la matière première, qui géraient parfois le personnel, qui allaient au champs, qui étaient là et pourtant invisibles statutairement. C’était choquant de lire sur leur carte d’identité sans emploi ou femme au foyer…

Mais cela a encore été plus choquant de voir la réaction au niveau des fermiers. Non seulement nous avons dû nous faire entendre au sein du monde politique mais nous avons dû également batailler au sein du monde agricole. Mais voilà, nous avons un bon statut qui protège et met en valeur la femme dans la ferme, c’est le plus important à retenir.

Un autre grand moment a été notre rencontre à Marie Ghislaine et moi. Nous venions de deux mouvements différents et pourtant tellement semblables. Chacune avec un peu de méfiance et dès que l’on s’est parlé, on était sur la même longueur d’onde, la mayonnaise a pris comme on dit. Depuis, nous ne nous quittons plus. Nous avons été Présidentes provinciales toutes les deux, nous faisons toujours partie du comité de Jodoigne, nous nous impliquons dans toutes les activités UAW avec la même ardeur. C’est l’Histoire d’une belle rencontre, d’une amitié solide.

MGD : En 1983, lors de notre Gouter de Noël, j’ai eu l’occasion de discuter quelques minutes avec la Reine Fabiola. J’ai vraiment été touchée par son humanité et l’admiration qu’elle avait pour les agricultrices en tant que femmes, mères et professionnelles. Cet échange privilégié avec la Reine a été un moment inoubliable.

C’est souvent lors de ce type d’occasion que l’on doit se dépasser, je garde d’ailleurs aussi en mémoire notre rencontre avec la Reine Paola qui, grâce à un buffet de gâteaux mais pas seulement, a mis en lumière les compétences des agricultrices.

Je me souviens également du voyage que j’ai pu faire en Italie avec le Bureau National de l’UAW, et notamment du fou rire mémorable que j’ai eu avec Anne-Marie Tasiaux. Ces voyages sont de beaux moments de découverte mais ils nous révèlent aussi les fractures qui existent entre les différents styles s’agriculture…

Et ce qu’il y a d’extraordinaire, c’est qu’en la personne de Christiane, j’ai trouvé une sœur.  J’ai vraiment découvert mon double et c’est inestimable ! Dès notre première rencontre nous avons été en connexion, « on pensait tout pareil ».

Tous les moments que je partage avec les autres agricultrices sont précieux : nous avons tellement de plaisir à nous retrouver, à être ensemble, à nous serrer les coudes pour relever un défi… Nous faisons corps et nous nous soutenons. Parfois nous engager demande un effort mais on est toujours contente de l’avoir fait ! Cela fait un bien fou de se retrouver !

L’UAW c’est vraiment le sel de ma vie de femme et d’agricultrice, c’est ce qui donne du goût à ma vie ! J’ai noué tellement de nouvelles amitiés grâce au mouvement.

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