50 ans de syndicalisme agricole - Nicole Hubert agricultrice à Bomal

UAW : Comment es-tu rentrée dans la structure syndicale féminine UPAF puis UAW ?

Après avoir arrêté l’enseignement pour accompagner mon mari seul sur l’exploitation, j’ai eu à un certain moment, un « besoin, un manque » de contacts humains vers le monde extérieur.

Déjà jeunes pendant mes études, j’ai beaucoup participé à de nombreux camps services avec la JEC dans des quartiers français, avec des enfants de milieux défavorisés. J’avais en moi, le besoin de m’investir dans des groupes sociaux.

Les enfants grandissaient ….et aux côtés d’un époux fortement engagé dans le syndicat agricole comme président cantonal…l’idée de m’investir dans un groupe germait… il me suggère un jour de participer à une après-midi rencontre avec les agricultrices du canton.

Le pas était fait… mais pas tellement positif pour moi car pour la plupart des agricultrices présentes à cette époque, je n’étais pas considérée comme « une vraie agricultrice ! »…et même certaines réflexions étaient blessantes à mon égard…

Je suis rentrée chez moi attristée, déterminée même à ne plus y mettre le nez…. J’ai hésité tout un temps d’y retourner… j’ai analysé la situation et puis déterminée d’affirmer ma conception de la place de la femme dans l’exploitation, j’ai « foncé ! »

UAW : Comment ton implication dans le mouvement a-t-elle évoluée ?

Mon implication a débuté au niveau cantonal en participant aux différentes activités proposées : syndicales, sorties culturelles, repas organisés par les agricultrices, cours de cuisine etc…) Puis réunions après quelques années, la présidente de l’époque démissionne et propose mon nom pour reprendre sa charge et les membres m’ont chargée de conduire la cantonale.

Après réflexions, j’ai accepté la charge et le rôle de guide avec comme bagages tous ces différentes occasions de partages, de découvertes… J’ai essayé de travailler avec le groupe, d’écouter leurs demandes, de partager leurs problèmes avec des professionnels extérieurs, d’évoluer dans notre métier et de faire « accepter au monde masculin « une autre considération de la place et du rôle de la femme dans l’exploitation, ses droits et ses devoirs …quel objectif !!!! Nous avons eu aussi le plaisir de partager des excursions culturelles très enrichissants dans les autres provinces et des découvertes de bons endroits de dégustations de produits de la ferme !!! c’était le début des restaurants à la ferme !!  Quel boulot et que de temps consacré pour réussir ces voyages … mais quel plaisir partagé !!!!

Au niveau provincial, toutes les présidentes cantonales étaient invitées à différentes rencontres. Madame Marion, Présidente provinciale terminait son mandat. Elle présenta ma candidature aux différentes présidentes et m’ont désignée par vote, pour les représenter au comité directeur du syndicat.

Nouveau challenge, nouvel engagement exigeant encore bien plus de disponibilité (Gembloux, ce n’est pas la porte à côtés…surtout en hiver !!!), plus de professionnalisme, d’écoute de la base et respect du message à proposer et à défendre au comité directeur.

Pour certaines de mes collègues agricultrices des autres provinces, le Luxembourg semblait avoir une « ardeur en arrière !!! » et là, mon rôle de représenter les femmes de ma région me tenait beaucoup à cœur et je revendiquais « écoute et considération « 

Il fallait aussi organiser les journées d’études, trouver un « sujet « motivant, expliquer nos revendications, nos projets pour l’agriculture de demain. La journée la plus enrichissante pour moi avait comme thème : « le projet de stage à l’extérieur pour les jeunes avant la reprise de l’exploitation familiale. »

Nous avions étudié ce problème en groupe avec les présidentes cantonales suite à des situations dramatiques vécues par des jeunes et avions estimé qu’il était urgent de discuter avec des professionnels de l’enseignement, des gens de lois etc… de la nécessité de permettre à un jeune d’effectuer ce stage avant de prendre des engagements… Nous avions « une longueur d’avance sur notre temps ! »

Moment fort : la foire annuelle de Libramont ! 5 Jours de boulot …un pour décorer le stand …encore « merci » spécialement à Francine Lequeux pour son soutien et son aide pour la réalisation des montages floraux avec peu de moyens…et à toutes les bénévoles ! mais quelle Joie de rencontrer, de recevoir les agricultrices et les agriculteurs dans « notre stand » et quelle disponibilité de toutes les dames des cantonales et aussi après concertation, avec les agricultrices des autres provinces !   UPAF puis plus tard, les UAW formaient une équipe soudée. Nous avions du plaisir de nous retrouver toutes ensemble pour réfléchir, pour travailler sur le statut des femmes agricultrices le combat du moment !

UAW : Qu’est-ce que le mouvement t’a apporté dans ta vie de femme et dans ta vie d’agricultrice ?

Le mouvement m’a beaucoup apporté :

 D’abord, j’ai pu affirmer mon rôle dans l’exploitation familiale. Au début, lors des différentes réunions, j’ai constaté que j’avais la chance d’être une « vraie agricultrice reconnue «. Mon cher Epoux m’a déclaré comme agricultrice à titre principale… donc j’avais la sécurité ce que peu de femmes avait dans les exploitations en Wallonie.

Lors d’une réunion provinciale des présidents cantonaux des UPA, j’ai proposé cette démarche de donner un statut au conjoint aidant … les réactions furent vives et peu ont accepté cette idée…

Heureusement, les choses ont bougé… grâce aux réunions de réflexions, de démarches sur ce sujet, du travail acharné sur ce sujet aux différentes réunions cantonales et provinciales, aux comités directeurs, aux conseils généraux, l’équipe des présidentes provinciales et les jeunes écoutées et soutenues par la Présidente nationale ont réussi ce défi : l’agricultrice d’aujourd’hui doit être protégée et doit avoir un statut.

Ensuite, le mouvement m’a permis de rencontrer des hommes et des femmes passionnés dans leur métier, de vrais professionnels du travail de la terre, de partager des moments agréables et enrichissantes sur le plan humain, de vivre aussi des difficultés de reprise d’exploitation, de découvrir des régions avec chacune leurs spécificités et leurs besoins. Que de partages et d’entraide dans le but de permettre l’épanouissement de la femme dans son rôle de femme, d’épouse d’agriculteur, de mère au foyer et aussi de chef d’entreprise !!!

UAW : Quels sont les moments qui t’ont le plus marqué au cours de ta vie syndicale ? (les plus importants, les plus marquants ou les plus heureux pour toi personnellement, UPAF et UAW)

En résumé, nous étions un groupe très soudé. Que de bons moments de partage avec Marie-louise lors des trajets en covoiturage vers Gembloux, par tous les temps… ! Les présidentes provinciales du Hainaut, Christiane Pottiez, de Liège, Jacqueline Diet, Irène, notre « chef » et surtout notre secrétaire Anne Pétré, toujours à notre écoute et aux petits soins pour nous. Elle nous a concocté de merveilleux voyages d’étude en France, la Lorraine, l’Alsace pour rencontrer et partager nos expériences avec les agricultrices de ces régions, découvrir leur projets de diversification à la ferme, des visites de fermes auberges…des fromageries artisanales. De beaux témoignages et exemples pour lancer dans notre mouvement, les projets de valorisation des produits de la ferme.

Un moment particulièrement plus difficile pour moi dans cet engagement syndical fut la fusion des 2 syndicats… certains restaient toujours avec d’anciens principes et opinions trop conservateurs et manquaient d’ouverture. 

Nous étions « des représentants, des délégués de la base de notre métier, de nos exploitations avec nos spécificités propres et nous devions nous « faire entendre, nous faire écouter avec nos revendications, nous battre » car c’était « Nous » qui formions le mouvement, nous agriculteurs et agricultrices sur le terrain !!

Ces quelques années à l’écoute et au service des autres, de femme engagée, m’ont permis de m’épanouir sur le plan personnel et familial, de porter un autre regard sur le métier, de lancer un message pour la défense de mes collègues agricultrices afin de leur assurer un véritable statut et une sécurité pour l’avenir. Nous avons préparé le travail « de demain ».dont beaucoup de choses s’appliquent aujourd’hui… et soyons en toutes fières « les passionnées mon époque »

Avec toute ma reconnaissance et ma sympathie à toutes les agricultrices que j’ai rencontrées !

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